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80 ans de droit de vote des Françaises : un long combat vers l’égalité 

Publié le 29 avril 2025
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80 ans de droit de vote des Françaises : un long combat vers l'égalité
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Le 29 avril 1945, dans une France libérée, les citoyennes se rendaient aux urnes pour la première fois à l’occasion d’élections municipales. Le chemin vers l’égalité civique a été long, ce premier vote fut chaotique mais il marque l’accès à un droit fondamental qui sera suivi d’autres. Toutefois, la parité et l’égalité en tous domaines restent à conquérir.

Le 21 avril 1944, les GI’s n’ont pas encore débarqué en Normandie et l’armée Rouge lance l’attaque sur la Pologne quand les Françaises connectées à Radio Londres apprennent qu’elles sont enfin reconnues citoyennes à part entière. A Alger, le Gouvernement provisoire du Général de Gaulle signe l’ordonnance leur accordant le droit de vote et d’éligibilité. Il rectifie ainsi une injustice civique majeure : seuls les hommes avaient accès au suffrage universel depuis 1848. Soit un siècle d’inégalité. Les pères-fondateurs de la République avaient pour slogan «  un homme une voix ». C’était oublier la moitié des voix !

Cette revendication était portée par de grandes figures telles Hubertine Auclert, pointant les limites du modèle républicain notamment au travers la carte postale créée par la société «  le Suffrage des Femmes » avec cette devise : « Les femmes qui subissent les lois et paient les impôts, doivent avoir comme les hommes le droit de voter »; ou encore la journaliste Marguerite Durant, fondatrice du premier quotidien féminin « La Fronde » réclamant « l’égalité des droits, le développement sans entraves des facultés de la femme, la responsabilité consciente de ses actes, une place de créature libre dans la société ».

Alors, d’une très inspirante «  déclaration des femmes et du citoyen » d’Olympe de Gouges à l’aube de la Révolution aux Congrès Féministes, le vote revendiqué des Françaises fait son chemin et s’installe dans le débat public. Dans les années 1920, l’Assemblée Nationale se prononce à plusieurs reprises favorablement, là où le Sénat systématiquement s’oppose. Crainte d’un vote similaire aux maris, qui ne serait donc pas « libre » ou d’un vote « dicté par les curés » : pendant 20 ans de débats politiques et de confrontations sur le sujet, le droit de vote des femmes s’échoue sur les conservatismes ou sur les calculs électoralistes. Reflet d’une société pas encore prête à entendre la voix des femmes… en politique, comme dans le monde du travail et la vie de tous les jours.

« Les femmes qui subissent les lois et paient les impôts, doivent avoir comme les hommes le droit de voter »

Dans la France libérée, la femme aussi obtient enfin une première libération ce 29 avril 1945. Même si voter ce jour-là n’est pas si simple : des citoyennes n’ont pas accompli la démarche de s’inscrire sur les listes électorales, et surtout la guerre a déplacé des millions de Français qui n’ont pas regagné leur commune d’avant la guerre ou vivent dans des domiciles provisoires.

Du décret et de ce premier vote, découle le 27 octobre 1946 une garantie d’égalité femmes / hommes dans le préambule de la Constitution, puis le principe de «  non-discrimination en raison du sexe » dans la déclaration universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948. Cette égalité s’inscrit ensuite dans les conventions de sauvegarde des droits de l’hommes et des libertés fondamentales en 1950 et dans le pacte international relatif aux droits économiques en 1966.

Avec la loi du 13 juillet 1965, l’émancipation et la libération s’accélèrent, puisque les femmes obtiennent le droit de travailler et d’ouvrir un compte bancaire sans l’autorisation de leur mari ou de leur père. Puis à partir de 1969 toutes les écoles publiques deviennent progressivement mixtes, et en 1972 les concours aux Grandes écoles s’ouvrent aux femmes… Les lois Neuwirth (1967) et Veil (1976) sur la contraception et l’IVG accordent des droits réclamés bien avant mai 68 par des millions de femmes.

En 2025 pourtant, le compte n’y est pas : les femmes restent moins nombreuses aux postes de dirigeants, dans les institutions politiques, professionnelles ou même en entreprise.

Toutefois, l’accès réel au pouvoir politique reste limité plusieurs décennies après ce premier vote de 1945. Le sujet de la représentativité féminine n’a surgi qu’au début des années 2000, face aux freins culturels, sociaux et politiques d’intégrer des femmes aux postes de responsabilité dans les partis, et à les présenter aux élections. Les lois sur la parité débloquent en partie ces obstacles et encouragent cette féminisation.

En 2025 pourtant, le compte n’y est pas : les femmes restent moins nombreuses aux postes de dirigeants, dans les institutions politiques, professionnelles ou même en entreprise.

Parce que comme le droit de vote, il s’agit de droits fondamentaux, les combats pour une société plus égalitaire, inclusive et tolérante restent plus que jamais d’actualité. Ils nous obligent aussi à regarder au-delà de nos frontières.

Comment ne pas être interpellés par les privations récentes de libertés des femmes dans des pays comme la Pologne, l’Italie, la Hongrie ou dans certains Etats américains ?  La vision conservatrice du rôle des femmes portée par l’AfD en Allemagne ou son homologue d’extrême droite Vox en Espagne porte une vraie régression des droits des femmes.

Enfin, comment oublier les atteintes aux libertés les plus basiques dans d’autres pays et l’enfermement au quotidien des femmes afghanes depuis 2021 ?

80 ans après, nous devons honorer celles et ceux qui ont permis cette évolution civique en faveur des femmes par leur ténacité et leur courage, sans jamais oublier qu’ils défendaient la démocratie. Le meilleur hommage que nous puissions leur rendre, c’est de préserver les droits acquis et d’en obtenir de nouveaux dans notre pays et au-delà. Sans jamais oublier qu’en République, chaque voix compte !

L’équipe de La République en Commun